Réforme des retraites : les sujets encore en suspens pour les agents publics

Publié le 11/03/2020

Après que le gouvernement a décidé d’utiliser le 49-3 sur un projet de loi Retraites largement amendé, intégrant notamment les mesures annoncées le 13 février relatives au C2P, à la prévention de la pénibilité, à la retraite progressive, au CET ou encore aux modalités de transition, de nombreuses questions restent en suspens. Lors d’une entrevue avec la CFDT Fonctions publiques, le 9 mars 2020, le secrétaire d'État à la Fonction publique Olivier Dussopt a précisé certains points et évoqué la piste d’une prise en compte des primes dans le calcul de la pension pour les agents nés avant 1975.

AEF - dépêche n°623515 - 3 mars 2020 par Clarisse Jay

L’entrevue avait été demandée par la CFDT Fonctions publiques et a été annoncée et largement relayée sur les réseaux sociaux. L’organisation syndicale a en effet rencontré le secrétaire d'État Olivier Dussopt lundi 9 mars 2020, estimant que, "malgré l’intégration d’un certain nombre d’amendements, le projet est encore loin de répondre aux enjeux de justice sociale", d’autant que le recours au 49-3 "a fait tourner court le débat".

L’objet de cette entrevue était donc pour la délégation de l’Uffa-CFDT (1) d'obtenir des précisions sur ce dossier et de porter à nouveau ses revendications. Si Olivier Dussopt, qui n’est pas décisionnaire sur ce dossier, n’a pas fait de révélations, il a toutefois précisé ou confirmé certains points tout en lâchant, tel un ballon d’essai, la piste d’un geste non négligeable pour les agents publics.

200 000 agents peu ou pas primés

De fait, Olivier Dussopt a laissé entendre lors de cette entrevue que le gouvernement réfléchissait à prendre en compte dans l’assiette de calcul de la pension, outre les primes des agents nés après 1975 (déjà acté par le projet de loi dont l’article 18 précise les modalités de transition prévue désormais sur 20 ans), celle des agents nés avant 1975, qui bénéficieraient alors d’un droit d’option, rapportait à AEF info à l’issue de l’entrevue, le syndicat. Ce qu’elle traduit plus officiellement, dans son compte rendu mis en ligne ce 10 mars, par une réflexion sur l’absence "d’augmentation des cotisations sur les primes, pour les agents nés avant 1975, sans ouverture de droits supplémentaires pour la pension". Toutefois, "ce n’est qu’une éventualité, pas du tout certaine, et selon des modalités qui resteraient à définir", tempère-t-il dans son compte rendu. Une telle disposition impliquerait de fait un coût supplémentaire certain et créerait inévitablement des inégalités entre agents bien primés et les autres.

S’agissant d’ailleurs des agents peu primés, le gouvernement se dit conscient que "l’alerte concerne surtout la fonction publique territoriale et les agents à temps non-complet" mais, "à ce stade", les employeurs territoriaux ne seraient "favorables ni à un niveau indemnitaire minimal garanti ni à l’obligation de délibérer sur le sujet des indemnités". À ce jour, le nombre d’agents peu ou pas primés (hors enseignants et enseignants-chercheurs) s’élèverait environ à 200 000, tous versants confondus.

pas d’engagement sur les rémunérations

Plus largement, le secrétaire d'État a également assuré que "les agents publics seront bien concernés par l’amendement intégré au projet de loi sur le niveau 'digne'", rapporte l’Uffa, tout en reconnaissant la nécessité "d’apporter des précisions". Dans la nouvelle version du projet de loi, l’article 1er sur le fondement et les objectifs du système précise désormais, depuis l’intégration d’un amendement gouvernemental, que le niveau de vie offert doit être "digne" (et non plus "satisfaisant").

Concernant plus précisément les agents polypensionnés, la "clause à l’italienne" (qui vise à garantir les droits acquis, y compris familiaux, pour les assurés nés avant 1975 lors de la première partie de carrière qu’ils auront effectuée dans les 42 régimes actuels) s’appliquera bien "pour celles et ceux qui finissent leur carrière dans la fonction publique", a rassuré Olivier Dussopt, sans pouvoir s’avancer cependant "sur quelque autre modalité concernant le calcul des droits pour le temps travaillé dans un autre régime" ni "sur les modalités qui s’appliqueraient à ceux qui termineraient leur carrière dans le secteur privé".

Concernant la question qui fâche, celle des rémunérations (que le gouvernement avait décidé de ne pas intégrer à la loi de transformation de la fonction publique préférant la traiter dans le cadre de la réforme des retraites), il a "concédé", comme il l’avait fait le mois dernier dans une interview à AEF info, "que la fin de la mise en œuvre de PPCR [en 2021] appellerait un nouveau travail sur ces sujets", indique la CFDT. Celle-ci réclame, comme les autres organisations syndicales, l’ouverture d’une négociation sur les rémunérations, estimant que "les carrières, les niveaux de rémunérations et leurs composantes (parts indiciaire et indemnitaire) doivent être revus".

Mais "Olivier Dussopt n’est toujours pas en mesure de prendre d’engagement à ce jour", regrette le syndicat. "Le rendez-vous salarial se tiendra avant l’été, comme c’est le cas depuis que je suis en responsabilité auprès [du ministre de l’Action et des Comptes publics] Gérald Darmanin. Son objectif est de permettre aux organisations syndicales d’exprimer leurs attentes avant que le Gouvernement procède à ses arbitrages budgétaires", avait-il indiqué à AEF info sans plus de précisions.

 (1) Composée de sa secrétaire générale Mylène Jacquot et de son adjoint Martial Crance, de la secrétaire générale d’Interco CFDT Claire Le Calonnec, de Catherine Nave-Bekhti, du Sgen, et de Bruno Lamy, secrétaire général adjoint de la CFDT Santé Sociaux.