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La cessation des fonctions des fonctionnaires

Publié le 10/07/2023 (mis à jour le 04/01/2024)

Cette fiche, rédigée par le pôle juridique de la CFDT Fonction publique, reprend les dispositions concernant la cessation de fonction des fonctionnaires. De quoi s'agit-il ? Qui est concerné ? Quels sont les cas de perte de la qualité de fonctionnaire ? Quels sont les droits des agents ? …

De quoi s'agit-il ?

Il s’agit des différentes causes qui amènent à ce qu’un fonctionnaire perde son statut, c’est-à-dire sa qualité de fonctionnaire. Ceci n’est pas exactement synonyme de perte de grade, car il existe d’autres modalités pour perdre son grade, la plus connue, et la plus appréciée, étant la promotion.

Qui est concerné ?

Les fonctionnaires titulaires. En effet, s’agissant des stagiaires, ceux-ci sont dans une situation intermédiaire et de brève échéance ; l’issue du stage se concrétisant, soit par la titularisation, soit par le licenciement, ou encore par la réintégration dans le corps ou le cadre d’emplois d’origine. Quant aux contractuels, ceux sous contrat à durée déterminée, sont dans une situation comparable aux stagiaires quant au caractère précaire de la situation. La situation des agents sous contrat à durée indéterminée se limite souvent, sauf procédure disciplinaire, à une seule alternative : l’attente de la retraite ou la démission.

Quels sont les cas de perte de la qualité de fonctionnaire ?

La première cause, la plus courante, est bien évidemment constituée par le départ à la retraite, ce qui se traduit par la demande de liquidation des droits à pension et aboutit à la radiation des cadres.

Attention : la mise à la retraite d’office existe aussi dans certains cas, par exemple en matière disciplinaire, ou lorsque l’agent est physiquement inapte, ceci sans prendre en compte la limite d’âge de l’emploi de l’intéressé (CE 25 septembre 2009, Ministère de la Santé, n°300781).

Plus généralement, outre la nécessité d’avoir 17 années de services civils ou militaires, il convient de relever que la condition de l’âge requis dépend de l’activité de l’agent, selon qu’il a ou non appartenu, au moins un certain temps à la catégorie « active »*, ceci par opposition à la catégorie « sédentaire ».

Parallèlement, il importe de noter que l’âge constitue un clause couperet : le départ est impératif à l’âge de 70 ans pour la catégorie « sédentaire » (sauf exceptions prévues par les textes pour certains corps dès lors que l’agent a atteint la durée de services exigée pour obtenir la pension maximum). Cette discrimination en raison de l’âge a été admise comme conforme au droit de l’Union Européenne (arrêt CE, 22 mai 2013, Communauté d’agglomération d’Annecy, n°351183). Si l’agent n’a pas la durée de service maximum, il peut demander à être maintenu en activité, ce que l’administration peut lui accorder sous réserve des nécessités de service (arrêt CE, 21 septembre 2020, CNRS, n°425960).

S’agissant du calcul du montant de la pension, celui-ci est source de nombreuses polémiques, voire de phantasmes, notamment en raison de la pratique qui amène à ce que, parfois, un agent fasse l’objet d’une promotion de grade à 6 mois de son départ. Parallèlement, il convient de relever que le montant de la retraite complémentaire des fonctionnaires, la retraite additionnelle de la fonction publique instituée en 2004, amène à verser un capital dans de très nombreux cas, plutôt qu’une pension, tant celle-ci serait faible.

Enfin, le fonctionnaire étant titulaire de son grade et non de son emploi (voir la fiche qui lui est consacrée), il ne touche pas d’indemnités de départ à la retraite, contrairement aux salariés du secteur privé.

Hormis ce cas de cessation des fonctions, il convient de distinguer 2 types de modalités qui amènent à perdre le statut : les modalités résultant d’une décision (B), par opposition à l’impossibilité de droit (A).

A - L’impossibilité de droit résulte du fait que l’agent ne répond plus aux 5 exigences pour avoir la qualité de fonctionnaire (voir la fiche « Conditions pour être fonctionnaire » à ce sujet).

En l’espèce, la première cause qui amène à une radiation des cadres sera la perte de la nationalité française (ou de ressortissant d’un État membre de l’Union Européenne ou d’un État membre de l’espace économique européen). La seconde cause sera la perte de jouissance des droit civiques résultant d’une condamnation pénale ou l’interdiction, encore par le Juge pénal, d’exercer une fonction publique.

Il importe de relever que l’employeur est alors dans une situation de compétence liée, c’est-à-dire qu’il n’a aucun pouvoir d’appréciation. L’agent doit être radié des cadres.

B - La perte de la qualité de fonctionnaire résultant d’une décision.

Il convient, ici encore, de distinguer 2 cas, selon que la rupture du lien statutaire résulte de la demande de l’agent ou non.

a) La rupture du lien statutaire à l’initiative de l’agent :

Il s’agit traditionnellement, soit de la démission, soit de l’abandon de poste, mais l’agent peut également solliciter la rupture par le biais d’une rupture conventionnelle (voir la fiche qui lui est consacrée).

De plus en plus fréquemment, il advient que l’agent est à l’initiative de la rupture, en faisant acte de démission. Attention, celle-ci doit être acceptée.

En application du principe de parallélisme des formes, puisque la nomination fait l’objet d’un écrit, la démission ne peut également résulter que d’un document écrit qui fait expressément mention de la volonté de l’agent, et qui doit être notifié à l’autorité compétente.

Il appartient à l’administration, non pas de prendre acte de la démission, mais de l’accepter, ceci dans un délai de 4 mois. Dans cette attente, l’agent reste en fonctions. À défaut d’exercer ses missions durant ce laps de temps, il encourt, soit une procédure disciplinaire, soit un licenciement pour abandon de poste.

La démission acceptée étant irrévocable, l’agent radié des cadres devra à nouveau passer des concours ou conclure un contrat pour pouvoir, à nouveau, travailler dans la fonction publique.

Il convient de relever que, dans certains cas, l’agent démissionnaire peut, sous conditions, bénéficier d’une indemnité. Il s’agit notamment du cas de la démission à l’occasion d’une réorganisation d’un service.

Le second cas dans lequel l’agent perd sa qualité de fonctionnaire à son initiative est celui de l’abandon de poste (voir la fiche qui lui est consacrée), c’est-à-dire dans le cas où il cesse d’exercer ses missions, rompant délibérément le lien statutaire, en violant son obligation de service, et qu’il est licencié après mise en demeure de réintégrer son poste.

b) La rupture du lien statutaire à l’initiative de l’administration :

Il existe ici encore 2 cas de fin des fonctions à l’initiative de l’employeur : le licenciement et la sanction disciplinaire.

Le licenciement est expressément prévu par les textes, notamment à l’article L553-1 du Code Général de la Fonction Publique (CGFP). Il convient d’ajouter le cas, de moins en moins fréquent, du licenciement pour inaptitude physique. Cette cause de licenciement tend à diminuer, en raison de l’obligation qui est désormais faite à l’employeur d’adapter l’emploi de l’agent, voire de chercher à le reclasser, y compris dans un autre corps ou cadre d’emplois (article L826-2 du CGFP). L’obligation de reclassement constitue un principe général de droit (arrêt CE du 2 octobre 2002, n°227868, Mme Fardouet) qui étend cette obligation, y compris en dehors des services de la collectivité (TA Melun du 13 octobre 2022, n°2005649, Département de la Seine et Marne).

Enfin, la rupture entre l’administration et l’agent peut résulter de la faute de l’agent qui emporte une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à l’exclusion de l’agent pour les fautes les plus graves. La sanction peut être, soit la mise à la retraite d’office, sous réserve que l’agent soit en droit d’y prétendre, soit la révocation, synonyme de licenciement pour faute, en droit de la fonction publique. Il convient ici évidemment de prendre en compte la gravité de la faute de l’agent (voir les fiches sur les obligations statutaires des agents) et de respecter une procédure, notamment la saisine du conseil de discipline. La différence essentielle en la matière, avec le droit du travail, réside dans le fait que le fonctionnaire, en application de ses obligations déontologiques, peut faire l’objet d’une sanction, y compris la plus grave, pour des faits relevant purement de sa vie privée, du moins en apparence, mais qui portent atteinte au prestige de son corps ou de son cadre d’emplois. De telles sanctions tendent à se multiplier avec internet et, notamment, les réseaux sociaux.

Quels sont les droits de l'agent ?

L’agent qui perd son statut aura, en fonction des causes de la perte de sa qualité de fonctionnaire, des droits différents : droit à pension en cas de départ à la retraite, droit à indemnisation pour perte d’emploi involontaire (l’Allocation de Retour à l’Emploi) ou, parfois, des indemnités de licenciement, par exemple, en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle.

Parallèlement, en cas de perte de sa qualité, l’agent peut contester l’acte, soit par un recours administratif (recours gracieux ou éventuellement hiérarchique), soit devant le Juge administratif.

Il importe ici de relever une différence fondamentale entre la situation de l’agent, par rapport à celle du salarié de droit privé. En effet, si le recours du fonctionnaire amène à l’annulation de la décision, celui-ci est réintégré de droit dans ses fonctions. De plus, l’annulation de l’acte emporte, de droit, des effets rétroactifs, en matière de rémunération et de carrière, avec reconstitution de celle-ci. En effet, l’agent est supposé n’avoir jamais quitté son poste.

Enfin, si l’agent est évincé irrégulièrement, il peut prétendre à une indemnisation du préjudice subi (CE 6 décembre 2013, Commune d’Ajaccio, n°365155), y compris dans le cas où son éviction résulterait d’une sanction disciplinaire disproportionnée (CE 28 mars 2018, Ecole des Mines de Nantes, n°398851).

En revanche, dans certains cas, le recours est voué à l’échec. Tel est ainsi par exemple le cas de l’agent qui a perdu ses droits civiques à la suite d’une condamnation pénale.

Enfin, l’agent admis à la retraite peut éventuellement accéder, soit à l’honorariat, c’est-à-dire devenir membre honoraire de son grade ou de sa fonction (administrateur honoraire), soit, s’agissant des enseignants, à l’émiratat, sous réserve de l’accord du conseil d’administration de l’établissement (professeur émérite).

En conclusion, il convient de noter qu’une hypothèse de fin des fonctions du fonctionnaire a été ici exclue : le décès de l’agent.

*Voir la définition dans le bloc « Définitions » du présent site.

 

Textes :

CGFP : article L553-1 à L553-3 et L551-1 et L551-2