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L’abandon de poste

Publié le 26/06/2023

Cette fiche, rédigée par le pôle juridique de la CFDT Fonction publique, reprend les dispositions concernant l’abandon de poste : De quoi s’agit-il ? Qui est concerné ? Quelle procédure ?  …

De quoi s'agit-il ?

L'abandon de poste constitue le fait pour un agent public de s’abstenir d’exécuter ses obligations en ne rejoignant pas son poste de travail, sans aucune justification et pour une durée prolongée. Il s’agit donc d’une absence de service fait découlant d’une violation de l’obligation de servir par une absence injustifiée et prolongée. L’abandon de poste sera concrétisé par l’absence de réponse de l’agent à une mise en demeure de son administration employeur de reprendre ses fonctions. L’employeur est alors susceptible d’engager une procédure qui, éventuellement, aboutira à l’exclusion définitive de l’agent. Il importe immédiatement de préciser que cette procédure, qui aboutit au licenciement de l’agent selon les termes du Code général de la fonction publique (CGFP), n’est pas une procédure disciplinaire.

Il convient de relever que l’absence doit être totale et prolongée, ce qui permet d’engager la procédure d’abandon de poste. En revanche, une telle procédure ne pourra être engagée, par exemple si l’agent multiplie les absences de courtes durées mais revient à son poste, s’il quitte momentanément son poste en cours de journée ou s’il est fréquemment en retard. Dans ces cas, seule une procédure disciplinaire pourrait être engagée. De même, l’agent qui occupe son poste sans effectuer son travail ne pourra faire l’objet d’une procédure d’abandon de poste.

Qui est concerné ?

L’ensemble des agents publics.

Quelle est la procédure ?

À noter : puisqu’il ne s’agit pas d’une procédure disciplinaire, l’agent ne peut arguer des traditionnels droits de la défense. Ainsi, la procédure débute par une mise en demeure de l’agent de rejoindre son poste dans un délai précis.

Si cette mise en demeure doit, selon les textes, prendre la forme d'un courrier recommandé avec accusé de réception, ou être remis en mains propres, cette dernière éventualité s’avère difficile à concevoir, l’agent étant par définition absent de son poste de travail.

Par ce courrier, l'administration doit ordonner à l'agent de reprendre son poste à une date limite. Ce courrier doit préciser que l’agent encourt une radiation des cadres ou des effectifs, ceci sans procédure disciplinaire préalable. Ce courrier doit être à la fois précis et suffisamment concis pour éviter toute ambiguïté. Ainsi, l’absence de délai fixé et le foisonnement d’informations dans le courrier valant mise en demeure fait naître un doute sérieux sur la légalité de la procédure (TA Cergy-Pontoise, Réf. 24 octobre 2022 Commune de Bezon, n°2212929). En effet, il importe que l’agent soit suffisamment et correctement informé, tant des risques encourus que des modalités lui permettant d’éviter la perte de son emploi.

Si l'agent ne se présente pas à son poste de travail dans le délai fixé et ne fournit pas de justificatif de son absence, l'administration peut considérer qu'il s’exonère lui-même de son obligation de servir. Il en résulte que l’agent est considéré comme étant à l’origine de la rupture des obligations statutaires, ce qui emporte la suppression des garanties disciplinaires, et autorise l'autorité compétente à le radier des cadres sans l'accomplissement des formalités qui s'imposent en matière disciplinaire. Ainsi, l’administration ne fait que prendre acte de cette situation (CE, 15 novembre 2006, n° 280424).

Quelle date de reprise ?

Le courrier doit préciser la date limite de reprise ; cette date doit être « appropriée » c’est-à-dire qu’elle doit prendre en compte les délais d’acheminent postaux et le temps nécessaire à l’agent pour éventuellement justifier de son absence, mais sans que ce délai ne soit trop important.

Quelles formalités à remplir ?

L’administration prend une décision de radiation des cadres ou des effectifs. Celui-ci est notifié à l’agent.

La décision est prise à l’issue du délai octroyé à l’agent pour rejoindre son poste. En application du principe de non-rétroactivité des actes administratifs, la décision est exécutoire à la date de sa notification. L’agent est donc radié des cadres à cette date et en aucun cas à la date à laquelle il s’est trouvé en absence injustifiée.

Quelle rémunération pendant l’absence ?

En l’absence de service fait, l’agent perd tout droit à rémunération, congés et RTT pour la période d’absence considérée, même s’il reprend ensuite son service.

Quelles conditions de réemploi à l'issue de l’absence ?

L’agent doit regagner son poste de travail. Toutefois, il est susceptible, notamment en cas d’absence prolongée, de devoir changer de poste s’il y a été remplacé, conformément au principe que l’agent est titulaire de son poste et non de son emploi (vor la fiche sur « Le grade et l’emploi »).

En l’absence de justificatif à son absence, il encourt une sanction disciplinaire.

Quelles conséquences sur la carrière ou le contrat ?

À l’issue de la procédure d’abandon de poste, l'agent perd sa qualité de fonctionnaire ou de contractuel ; il est licencié selon la formule du CGFP. Très précisément, le fonctionnaire est radié des cadres tandis que le contractuel est radié des effectifs.

Il importe de rappeler que l'abandon de poste est assimilé à une rupture à l’initiative de l’agent. En conséquence il n’a droit, ni à une indemnité de licenciement, ni aux allocations chômage. De même, il perd ses congés annuels et ses RTT non pris, sans que ceux-ci soient indemnisés.

Quels sont les droits de l'agent ?

L’agent a le droit de justifier de son absence mais, sauf à supposer qu’il démontre l’impossibilité d’apporter cette justification en temps utile, celle-ci doit intervenir au plus tard à la date à laquelle l’agent a été mis en demeure de rejoindre son poste. De sorte, l’envoi d’un certificat médical, postérieurement à la date à laquelle l’agent devait rejoindre son poste, alors de surcroît que celui-ci a épuisé ses droits à congés maladie, ne constitue pas une justification suffisante selon le juge des référés (CE, 23 décembre 2022, Commune de Bouillargues, n°463591).

Quelles sont les obligations de l'agent ?

Afin d’éviter de perdre sa qualité d’agent public, il appartient à l’agent d’obtempérer à la mise en demeure de rejoindre son poste. Mais cette reprise doit être effective. Ainsi, le seul fait de manifester, par un courrier par exemple, son intention de revenir, ne suffit pas. De même, le fait de se présenter au sein de son service, accompagné de trois représentants syndicaux, n’a pas été assimilé à une reprise effective du travail (CE, 22 décembre 2022, SDMIS du Rhône, n°448005).

 

Textes :

CGFP : Article L553-1 ;

Circulaire n° 463/FP du Premier ministre relative à l'abandon de son poste par un fonctionnaire. JORF 26 février 1960 p.1895.  (en pdf à télécharger).