Devant la détérioration des conditions de travail et le mépris d’une direction aux abonnés absents, la section de Satys a lancé un mouvement de grève inédit, payant à plus d’un titre.
Un ras-le-bol généralisé. C’est ce qui a conduit, au début juin de cette année, les 180 peintres aéronautiques de Satys Sealing & Painting à se mettre en grève pendant deux semaines. « Les patrons ne nous respectent pas. Tout le monde en a marre. Le courbage d’échine, c’est terminé. L’intimidation, c’est fini ! », s’exclame Julien Vitrant, 33 ans, élu au CHSCT depuis un an et délégué syndical depuis… moins de deux jours. « Je me suis retrouvé tout de suite au cœur du réacteur. » Le défi n’a pas effrayé ce jeune élu, qui a pu bénéficier de l’expérience et des précieux conseils de Florian Parolin et Stéphane Seube, respectivement délégué du personnel et ancien délégué syndical.
La section, forte de ses 50 adhérents, alerte la direction, depuis plusieurs mois déjà, sur le profond malaise des peintres ces dernières années.
Des conditions de travail devenues trop dangereuses
Forte proximité avec les adhérents Objectif prioritaire : gagner les élections |
« On leur en demande toujours plus, alors que leurs conditions de travail se détériorent et que les salaires ne progressent pas », poursuit Julien. Les salariés sont nombreux à se plaindre de douleurs physiques. Les troubles musculo-squelettiques (TMS) ou maux de dos n’épargnent aucun peintre. « Des mecs de 30 piges donnent l’impression d’en avoir dix de plus », s’inquiète-t-il, en évoquant le cas d’un collègue qui après avoir signalé une vive douleur à la main droite, s’est entendu répondre : « Tu n’as qu’à utiliser la gauche ! » Cela ne surprend pas Sofiane Redellah, 26 ans, dans la boîte depuis sept ans. « Ça fait une éternité qu’on demande des ventilateurs assistés qui nous permettraient de respirer un air frais en continu pendant qu’on peint, on nous dit oui mais on ne voit toujours rien venir, on est obligé de travailler avec nos masques intégraux. On étouffe là-dessous. La direction ne reconnaît pas la pénibilité de notre travail alors que nous sommes debout toute la journée, exposés aux peintures et aux vapeurs toxiques », résume l’ouvrier avec amertume. Plus grave encore, depuis plusieurs mois, la CFDT dénonce un risque d’accident sur un des postes de travail. Malgré ces alertes répétées, rien n’est fait. « Jusqu’au jour où on a frôlé le drame. Un collègue a littéralement pris feu ! », poursuit Julien. Une réunion de crise est organisée avec les responsables. « Mais pour eux, puisque le salarié s’en est sorti sans séquelles, c’est comme s’il ne s’était rien passé. On a l’impression qu’ils attendent qu’il y ait un mort pour agir. » Les accidents se multiplient et les arrêts de travail explosent. Les salariés sont épuisés et la charge de travail est sous-estimée.
Afin de pallier les absences des salariés et la gestion défaillante de ses ressources humaines, l’entreprise fait le choix de recruter des intérimaires ou d’embaucher de jeunes peintres. Malheureusement, ils ne sont pas formés… ce qui accroît évidemment le risque d’accident. « Plutôt que s’attaquer à la racine du problème, l’employeur s’acharne à adopter des stratégies d’évitement. On va droit dans le mur ! » Malgré l’inquiétant constat dressé par les syndicalistes, rien ne change. La santé financière de l’entreprise est pourtant bonne, les carnets de commandes sont pleins et le groupe vient de réaliser plusieurs opérations à l’international. Alors, comment en est-on arrivé là ? « Les salariés ne sont pas la priorité de la direction », répond Sofiane. Le peintre dénonce par ailleurs l’attitude complaisante de FO avec les dirigeants. « Le problème, c’est qu’ils ne proposent rien, ne se concertent pas avec les salariés et signent tout les yeux fermés ! » Et si la CFDT est première organisation parmi les peintres, elle n’est pas implantée chez les étancheurs. Résultat : aux dernières élections, FO a remporté 51 % des voix, contre 34 % pour la CFDT.
Une mobilisation totale face à une direction méprisante
Le 2 juin, les équipes du week-end des cinq cabines de peinture, à bout, entament leur grève. La première depuis vingt ans. Le lundi suivant, les collègues de la semaine se rallient à elles. La totalité des peintres aéronautiques du site rejoint le mouvement. « Cent pour cent de grévistes ! », exulte le délégué syndical, qui a bien conscience que le plus dur commence. « Nous sommes devant la direction avec des propositions claires : une hausse des salaires, une augmentation des effectifs, l’amélioration des conditions de sécurité, des horaires de travail plus encadrés… » « “J’ai la solution pour satisfaire vos attentes, on va virer 50 gars.” Voilà ce qu’on m’a répondu », poursuit-il, encore abasourdi par un tel mépris. C’est donc sans surprise que les…